Fabrice Raspati Auteur

Fabrice Raspati Auteur

Mark / San Marcos - Lac Atitlan/ Guatemala

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Mark vient de Los Angeles, Californie, États Unis d’Amérique.

Il a une grande barbe grisonnante, des cheveux mi longs gris et blonds et un chapeau type hobo. Il aime parler, il adore parler. Mark s’arrête rarement de parler. Juste le temps de faire remarquer qu’il parle trop. Juste le temps d’un grand éclat de rire. Peut être encore le temps de faire remarquer qu’il rit à ses propres blagues. Et parfois un dernier temps pour rajouter qu’il est vrai que ce sont de très bonnes blagues ! Et il se remet à parler. Le silence l’intimide dit-il parfois.

Mark travaille pour la télévision et le cinéma depuis une vingtaine d’années. Il est anthropologue et réalise des documentaires. C’est épuisant parce qu’il y a beaucoup d’argent en jeu. Beaucoup de réunions où il faut beaucoup parler. C’est épuisant, il est épuisé. Il est venu à San Marcos de la Laguna, sur les rivages du lac Atitlan, pour se reposer. Il reste deux mois ici, en plein cœur de la civilisation Maya. Mark aime aller à la rencontre des Mayas. Mark ne parle pas Espagnol, mais sa femme parle 5 langues. Il est installé à la terrasse d’un des bars pour occidentaux, face à l’eau calme du lac, là où l’on peut manger des pancakes aussi bons qu’à L.A. Il lit sur son IPhone un livre remarquable sur la culture Maya. La vue sur le lac et les volcans autour est incroyable ! Le lac a été créé par l’erruption de l'un d'entre eux il y a deux millions d’années. Mark observe les femmes Mayas qui grimpent le chemin en pente raide le long duquel se trouve le bar. Elles portent chacune sur leur dos une trentaine de kilos de bois coupés en bûchettes. L’équivalent de 15 dollars US une fois vendu. Mark trouve ça très impressionnant. Il  en parlait avec passion la veille avec des Américains qu’il a rencontrés et qui ont créé une ferme en permaculture. Ils ont investi sur ces terres, y ont construits des eco-lodge et des espaces pour faire du yoga et des retraites spirituelles. Ils font travailler des Mayas à l’entretien et dans les cuisines. Ils les payent peu, mais suffisamment pour qu’ils s'en sortent. Mark trouve que c’est une collaboration gagnant gagnant, même s’il concède que cela ne change pas beaucoup de l’organisation sociale des conquistadors espagnols !

Mark se passionne pour la cosmovision Maya. Il résumerait cela en disant que lui est un être vivant;  comme une pierre, un cactus ou un chien. Et lui, comme la pierre, le cactus ou le chien sont une partie du cosmos et sont donc sacrés.

Mark doit souvent interrompre sa lecture pour saluer quelqu’un. Il fait très attention à l’autre et, comme il le dit, il ne comprendrait pas qu’on ne l’aime pas !

Il sait que quand il rentrera à L.A il démarrera l’écriture d’un projet sur ce peuple. Il faudra convaincre l’industrie du divertissement du caractère "bancable" d’un énième documentaire ethnique. Mais il tient son sujet :  la sauvegarde de la planète du point de vue de la cosmovision. Le public sera friand d’une telle gourmandise qu'il gobera comme un anxiolytique.

Marc sait que ce monde, le sien, est en train de s'écrouler lentement. Les fondations sont comme bourrées de termites. Il regarde un pêcheur sur son minuscule canoë en bois. Debout, il rame et son esquif parait être là depuis toujours. Il écrit sur son notebook:  "J'ai une fonction écologique...Je suis comme un fossoyeur arrivé avant l'enterrement."

 



03/09/2019
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